International Criminal Court (ICC)
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Questions et Réponses sur les charges à l’encontre de Joseph Kony et le début de sa confirmation des charges à la Cour pénale internationale

Situation en Ouganda, Affaire Le Procureur c. Joseph Kony

LA HAYE, Pays-Bas, 22 mars 2024/APO Group/ --
  • QUI EST JOSEPH KONY?

Joseph Kony est né en septembre 1961 en Ouganda. Il est d'origine ethnique Acholi et ressortissant ougandais. Il est le fondateur et chef présumé de l’Armée de Résistance du Seigneur (« ARS »), un groupe rebelle ougandais fondé en 1987 dans le nord de l’Ouganda au sein des communautés ethniques Acholi.

  • M. KONY EST-IL DÉTENU PAR LA CPI ?

Non, le suspect, M. Joseph Kony, est toujours en fuite 19 ans après que son arrestation ait été ordonnée.
Depuis la délivrance, en 2005, du mandat d'arrêt à son encontre, la Cour pénale internationale (« CPI » ou la « Cour ») recherche la coopération de toutes les autorités nationales compétentes afin de l'arrêter et le remettre à la Cour.

  • QUELS SONT LES DERNIERS DÉVELOPPEMENTS À LA CPI EN CE QUI CONCERNE L'AFFAIRE KONY ?

Le 4 mars 2024, la Chambre préliminaire II de la CPI a rendu une décision sur la demande du Procureur de tenir une audience de confirmation des charges dans l'affaire contre Joseph Kony en l'absence du suspect, s'il ne comparaît pas, et a fixé la date de cette audience, qui doit débuter le 15 octobre 2024.

  • SUR QUELLE BASE LES JUGES DE LA CPI ONT-ILS DEMANDÉ DE TENIR UNE AUDIENCE DE CONFIRMATION DES CHARGES EN L'ABSENCE DE M. KONY ?

Le Statut de Rome (le traité fondateur de la CPI) autorise la tenue d'une audience de confirmation des charges en l'absence d'un suspect. Ceci est possible lorsque :

  • le suspect est en fuite ou introuvable,
  • toutes les mesures raisonnables ont été prises pour assurer sa comparution devant la Cour, et
  • toutes les mesures raisonnables ont été prises pour informer le suspect des charges portées à son encontre et pour le notifier de la tenue d'une audience visant à confirmer ces charges.

Si les charges sont confirmées, l'affaire ne peut être jugée que si l'accusé est présent devant la Chambre de première instance. L'existence d'une procédure de confirmation des charges par contumace permettrait d'accélérer les poursuites contre un suspect introuvable. Toutefois, comme l'a déjà indiqué la même Chambre, cette procédure n'est applicable que dans des circonstances exceptionnelles.

  • QU'EST-CE QU'UNE AUDIENCE DE CONFIRMATION DES CHARGES ?

L'audience de confirmation des charges n'est PAS UN PROCÈS et se situe dans la phase préliminaire de la procédure. L'objectif de l'audience de confirmation des charges est de déterminer s'il existe des preuves suffisantes pour ouvrir un procès. Il s'agit d'une audience préliminaire publique au cours de laquelle les juges évaluent et décident de confirmer ou non, partiellement ou dans leur totalité, les charges retenues par le Procureur à l'encontre d'un suspect – Joseph Kony, en l'occurrence. Si l'une des charges est confirmée, l'affaire peut être mise en procès devant une chambre de première instance, mais uniquement en présence de l'accusé.

La Chambre entendra les plaidoiries, généralement en commençant par l'Accusation, suivie des Représentants légaux des victimes et de la Défense. L'audience est prévue à partir du 15 octobre 2024 au siège de la Cour à La Haye, aux Pays-Bas, et dure généralement quelques jours. À l'approche de la date de l'audience, les juges rendront une ordonnance contenant davantage d'informations sur le déroulement et la durée de l'audience, ainsi que sur la comparution des témoins en personne ou par liaison vidéo.

  • QUEL TYPE DE DÉCISIONS LA CHAMBRE DE LA CPI PEUT-ELLE PRENDRE À L'ISSUE DE L'AUDIENCE DE CONFIRMATION DES CHARGES ?

À l'issue de l'audience de confirmation des charges, la Chambre préliminaire rend sa décision écrite dans un délai de 60 jours. Les juges de la Chambre préliminaire peuvent :

  • confirmer partiellement ou dans leur totalité les charges retenues contre M. Kony, mais dans ce cas, M. Kony devra toujours être présent devant la CPI, car il n'y a pas de procès par contumace selon le Statut de Rome de la CPI ;
  • rejeter toutes les charges et arrêter la procédure contre M. Kony (cela se produit si les juges décident que les preuves disponibles ne sont pas suffisantes ou assez convaincantes pour aller jusqu'au procès) ; ou,
  • ajourner l'audience et demander au Procureur d'apporter des éléments de preuve supplémentaires, de mener des enquêtes complémentaires ou de modifier toute accusation pour laquelle les éléments de preuve établissent un crime différent de celui qui a été inculpé.

Si les avocats de M. Kony et le Procureur veulent interjeter appel de la décision, ils doivent demander l'autorisation de la Chambre. Si l'appel est autorisé, l'affaire sera jugée par une autre Chambre - la Chambre d'appel, composée de cinq autres juges.

  • COMMENT M. KONY SERA-T-IL DÉFENDU DEVANT LA CPI ET QUI PAYERA SA DÉFENSE ?

Tous les suspects de la CPI, y compris M. Kony, sont présumés innocents jusqu'à preuve du contraire, et ils ont droit à une représentation juridique lorsqu'ils comparaissent devant la Cour. Si le suspect ne comparaît pas devant la Cour, les juges peuvent désigner un avocat pour agir au nom de M. Kony.

En décidant de tenir une audience en l'absence de M. Kony, les juges de la CPI ont chargé le Greffier d'entamer le processus de sélection d'un avocat pour représenter ses droits et ses intérêts au cours de la procédure de confirmation des charges et de l'audience de confirmation des charges, si celle-ci devait avoir lieu en son absence.

Dans la décision de tenir l'audience de confirmation des charges contre M. Kony en son absence, la Chambre préliminaire a fixé l'audience au 15 octobre 2024 afin de s'assurer que le conseil de la Défense disposera de suffisamment de temps pour se préparer en l'absence du suspect, en raison de la portée des allégations de l'Accusation et de la quantité potentiellement volumineuse de documents que l'Accusation est susceptible de fournir dans cette affaire.

Si M. Kony est déclaré indigent, la Cour prendra en charge les frais de sa défense, conformément au système d'aide judiciaire.

  • QUEL EST LE RÔLE DE LA DÉFENSE LORS DE L'AUDIENCE DE CONFIRMATION DES CHARGES ?

M. Kony est un suspect dans la procédure et, comme tous les suspects de la CPI, il est présumé innocent tant que sa culpabilité n'a pas été prouvée devant la Cour conformément au droit applicable.

L'audience de confirmation des charges n'est pas un procès. L'objectif de la confirmation des charges est de permettre à la Chambre préliminaire de confirmer que le Procureur a présenté des preuves suffisantes pour ouvrir un procès. Les juges peuvent également rejeter les charges.

Tout au long de l'audience de confirmation des charges, la Défense vérifiera les éléments de preuve présentés par le Procureur et présentera toute contestation relative à la compétence ou à la recevabilité.

Au stade de la confirmation des charges, l'Accusation doit démontrer à la Chambre préliminaire qu'il existe des éléments substantiels permettant de croire que les charges portées contre l'accusé existent, de sorte que l'affaire puisse être jugée. Si les charges sont confirmées, la présomption d'innocence persiste et il incombe désormais à l'Accusation de présenter des preuves de culpabilité au-delà de tout doute raisonnable pour qu'une Chambre de première instance puisse déclarer l'accusé coupable de ces charges. Dans le cas contraire, les juges le déclareront innocent.

  • QUEL EST LE RÔLE DES VICTIMES AU STADE DE LA CONFIRMATION DES CHARGES ? LES VICTIMES POURRAIENT-ELLES PARTICIPER À UNE TELLE AUDIENCE ?

Les victimes peuvent participer à la procédure devant la CPI, en présentant leurs points de vue et leurs préoccupations. Les victimes sont autorisées à participer à la procédure par les juges de la Chambre préliminaire en charge de l'affaire Kony.

Les juges de la CPI ont déjà par le passé autorisé 41 victimes à participer à l'affaire Kony, et ont désigné comme leurs représentants légaux Maîtres Paolina Massidda, Conseil principal du Bureau du conseil public pour les victimes (BPCV), et Sarah Pellet, Conseil au BPCV.

Les juges décideront bientôt de la procédure à suivre pour permettre à d’autres victimes de demander à participer à l’audience de confirmation des charges qui doit commencer le 15 octobre 2024. Les victimes seront ensuite informées de la manière de demander à participer à cette procédure.

  • QUEL EST LE RÔLE DES REPRÉSENTANTS LÉGAUX DES VICTIMES LORS DE L'AUDIENCE DE CONFIRMATION DES CHARGES ?

Un Représentant légal des victimes est un avocat qui représente les intérêts des victimes dans la procédure. Lors de la confirmation des charges, le Représentant légal (avocat) sera présent dans la salle d'audience pour suivre la procédure. Après avoir consulté les victimes, il pourra présenter des déclarations liminaires et finales au nom des victimes et intervenir sur toute question de fait ou de droit soulevée lors de l'audience et affectant les intérêts des victimes.

  • QUELLES SONT LES VICTIMES QUI PEUVENT DEMANDER À PARTICIPER À L'AUDIENCE DE CONFIRMATION DES CHARGES CONTRE M. KONY ? ET COMMENT PEUVENT-ELLES LE FAIRE ?

Les victimes directes et les survivants qui n'ont pas encore demandé à participer, ainsi que les victimes indirectes, y compris les membres de la famille proche des victimes directes, peuvent demander à participer à l'affaire s'ils ont subi un préjudice du fait des crimes commis à l'encontre des victimes directes.

Le champ d'application de l'affaire Kony contenu dans le document contenant les charges communiqué par le Procureur le 19 janvier 2024 comprend :

  • Différents crimes commis lors de l'attaque de l'école de filles de Lwala - 24 juin 2003 et des camps de personnes déplacées (Pajule - 10 octobre 2003, Abia - 4 février 2004, Barlonyo - 21 février 2004, Odek - 29 avril 2004, Pagak - 16 mai 2004, Lukodi - 19 mai 2004 et Abok - 8 juin 2004) ;
  • Crimes contre des enfants de moins de 15 ans et des femmes enlevés et intégrés dans l’ARS depuis au moins le 1er juillet 2002 jusqu'au 31 décembre 2005 ;
  • Crimes directement perpétrés par M. Kony, y compris la réduction en esclavage, le mariage forcé, le viol, la torture et l'esclavage sexuel.

Les juges de la CPI n'ont pas encore décidé du système et des modalités de participation des victimes. Par conséquent, plus de détails sur les demande de participation seront communiqués une fois que cela aura été clarifié. Les victimes qui souhaitent obtenir davantage d'informations sur les droits des victimes devant la CPI et sur l'affaire Kony peuvent contacter la Section de la participation des victimes et des réparations : i) par courriel à l'adresse VPRS.Information@icc-cpi.int ; ou ii) par téléphone (ou WhatsApp) au +256772532830 (membre du personnel travaillant pour la Section de la participation des victimes et des réparations au sein du bureau de pays en Ouganda).

  • LES VICTIMES DES CRIMES PRÉSUMÉS COMMIS PAR M. KONY PEUVENT-ELLES DEMANDER DES RÉPARATIONS DEVANT LA CPI ?

Les victimes ont droit à des réparations (et le droit de participer à la procédure) dans le cadre de toute affaire relevant de la compétence de la CPI, y compris l'affaire Kony, si un accusé est déclaré coupable. Les victimes doivent savoir que, devant la CPI, les réparations ne peuvent être accordées que si l'accusé a été condamné à l'issue d'un procès – et donc seulement bien après la confirmation des charges.

À ce stade, l'affaire Kony en est à la phase préliminaire et, même si les charges sont confirmées, aucun procès ne peut s'ouvrir avant que M. Kony n'ait été remis à la CPI. Par conséquent, à moins que M. Kony ne soit arrêté et reconnu coupable des charges retenues contre lui à l'issue d'un procès pénal devant les juges de la CPI, aucune réparation ne pourrait être accordée aux victimes ayant subi un préjudice du fait des crimes qu'il aurait commis.

Outre les réparations, les victimes qui ont subi un préjudice du fait de crimes relevant de la compétence de la CPI dans le cadre de la situation en Ouganda peuvent bénéficier de programmes de réadaptation visant à remédier à leur préjudice.  Le Fonds au profit des victimes de la CPI peut fournir une assistance aux victimes par le biais de traitements médicaux, de conseils, d'une réadaptation et d'un soutien aux moyens de subsistance au profit des victimes, de leurs familles et des communautés affectées qui ont subi un préjudice du fait de crimes relevant de la compétence de la Cour. Le programme d'assistance est mis en œuvre dans la région affectée par le conflit du grand nord de l'Ouganda.

  • L'AFFAIRE DE JOSEPH KONY EST-ELLE LIÉE À CELLE DE DOMINIC ONGWEN ?

Le 6 février 2015, les juges de la CPI ont disjoint la procédure contre Dominic Ongwen de l'affaire Le Procureur c. Joseph Kony, Vincent Otti, Okot Odhiambo et Dominic Ongwen. Dans la mesure où les juges avaient alors confirmé la mort de deux des suspects et mis fin aux procédures à leur encontre, et que les autres suspects étaient toujours en fuite, les juges ont estimé nécessaire de séparer l'affaire afin de ne pas retarder les procédures contre M. Ongwen, qui était déjà détenu par la Cour. Avec la disjonction de ces affaires, celles-ci sont désormais considérées comme des affaires distinctes, des procédures distinctes, et traitées par des juges différents de la CPI.

Le procès dans l'affaire de M. Ongwen s'est ouvert le 6 décembre 2016 et s'est conclu en mars 2020 après la présentation des déclarations de clôture des parties et des participants. Le 4 février 2021, la Chambre de première instance IX a déclaré Dominic Ongwen coupable d'un total de 61 crimes contre l'humanité et crimes de guerre, commis dans le nord de l'Ouganda entre le 1er juillet 2002 et le 31 décembre 2005. Le 6 mai 2021, la Chambre de première instance IX a condamné Dominic Ongwen à 25 ans d’emprisonnement. Il a été transféré en Norvège pour y purger sa peine.

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